13 novembre 2012
Titre original
600 mots – Temps de lecture : 3 minutes
Mots clés
Cradle to Cradle
Review
Ce livre ambitieux a connu un immense succès à sa sortie en 2002 (300 000 exemplaires vendus dans la version anglaise). Pourtant, j’ai constaté que de nombreux décideurs ne le connaissent pas encore, bien que les messages qu’il délivre soient plus importants que jamais.
Michael Braungart, chimiste et William McDonough, architecte, prennent une position très différente de beaucoup d’auteurs en évitant délibérément un langage culpabilisant et en refusant le discours sur le rejet de la croissance.
Ils critiquent cependant :
– la façon dont la plupart des entreprises opèrent
– le mouvement actuel en faveur de “l’eco-efficiency” (efficacité environnementale)
Ce qu’ils appellent le modèle “cradle-to-grave” (du berceau au tombeau) domine les entreprises modernes : chaque chose est conçue pour être jetée après utilisation. De plus, l’infrastructure industrielle est entièrement tournée vers le seul objectif de croissance, souvent aux dépens de la santé écologique et humaine des générations à venir (ce que les auteurs qualifient de “tyrannie intergénérationnelle”).
Pour eux, il est temps maintenant que les fabricants et les designers prennent une décision forte : “Nous ne pouvons pas continuer à maintenir ce système”. Comme les auteurs l’affirment avec fermeté : la négligence commence demain.
Il est urgent de passer à une approche “cradle-to-cradle” (du berceau au berceau) qui donne priorité aux produits et services conçus pour régénérer et nourrir le reste de la planète.
Jusqu’à présent, malheureusement, le changement a surtout pris la direction de “l’eco-efficiency”, expression inventée par le Business Council for Sustainable Development (voir notre précédente revue du livre “ Vision 2050”).
L’eco-efficiency consiste à faire plus avec moins. Les mots-clés de cette approche sont : réduire, éviter, minimiser, renouveler, limiter. Mais pour Braungart et McDonough, “being less bad is no good”. La réduction n’arrête pas la dégradation et la destruction, elle ne fait que les ralentir. Par exemple, la réduction des substances dangereuses dans un produit n’est pas suffisante car même des petites quantités sont nocives sur la durée. Egalement, la plupart du recyclage est en fait du “downcycling”: la qualité des matériaux se dégrade au cours du processus, qui peut aussi augmenter la pollution car de nombreux produits chimiques sont souvent ajoutés pour permettre une nouvelle utilisation (c’est le cas pour le papier recyclé, par exemple).
Pour les auteurs l’efficacité énergétique n’est pas une stratégie de succès à long terme car elle ne va pas assez loin . L’approche “less bad” est tout simplement un manque d’imagination.
Voici un exemple qui illustre la différence entre l’efficacité énergétique et l’approche “du berceau au berceau”: un livre éco-efficace est imprimé sur du papier recyclé avec de l’encre à base de soja, tandis qu’un livre conçu avec une approche “du berceau au berceau” est un concept entièrement nouveau (pages en polymères indéfiniment recyclables avec un niveau de qualité égal, encres non toxiques pouvant être extraites des polymères avec un processus simple et sans produits chimiques). Un tel livre peut être récupéré et réutilisé pratiquement à l’infini.
Encore plus inspirant est l’ambition de concevoir des produits et services qui imitent la variété et l’abondance qu’offre la nature. Par exemple, les auteurs travaillent sur des produits qui ne deviennent pas des déchets inutiles après utilisation mais peuvent se décomposer et devenir des aliments pour les plantes et les animaux et des nutriments pour le sol (des emballages en mousse innovants, par exemple).
L’approche “du berceau au berceau” est appliquée spontanément dans la nature, où rien n’est gaspillé. Les auteurs affirment que l’humanité doit s’inspirer de cette sagesse si elle veut préserver son existence. Ils proposent dans ce livre de nombreux exemples concrets qui ouvrent de nouvelles pistes dans cette direction.