Revenir à une vraie sécurité alimentaire, de Michael Carolan

13 janvier 2014

599 mots – Temps de lecture : 2 à 3 minutes

Mots clés

Sécurité alimentaire, FHSI


Titre original : “Reclaiming Food Security“. Pas de traduction française.

Michael Carolan est professeur à la Colorado State University et auteur de plusieurs livres, dont The Real Cost of Cheap Food, et Society and the Environment: Pragmatic Solutions to Ecological Issues.

Dans la communauté internationale, la sécurité alimentaire est couramment définie comme la production d’un nombre de calories moyen suffisant pour chaque habitant d’un pays. En se basant sur cette définition, la sécurité alimentaire semble avoir progressé dans le monde au cours des 30 dernières années, grâce à la Révolution Verte : début 2000, il y avait en moyenne 17% de calories en plus par personne que 30 ans auparavant, bien que la population mondiale ait augmenté de 70%.

Un tel progrès ne profite pas aux 900 millions de personnes qui continuent à souffrir de la faim. La Révolution Verte, en effet, requiert des investissements (machines, engrais, pesticides etc.) que les paysans les plus pauvres – les plus touchés par la faim – ne peuvent réaliser.

Mais l’augmentation du nombre de calories par personne s’est aussi traduite par un coût extrêmement élevé. En prenant en considération la dégradation de l’environnement, les atteintes à la santé humaine et la perte de souveraineté alimentaire de certains pays, la sécurité alimentaire aurait finalement plutôt finalement régressée.

L’attention exclusive aux quantités produites a en effet entraîné plusieurs déséquilibres :

  • Beaucoup de pays sont envahis de produits alimentaires industriels, bon marché mais peu nourrissants, qui représentent une menace pour la santé, notamment en accroissant les risques d’obésité.
  • D’un point de vue environnemental, la plupart des systèmes de production de notre alimentation ne sont pas durables, car ils sont des facteurs majeurs de réchauffement climatique, consomment trop d’eau, et détruisent les sols.
  • Certains pays qui étaient, dans les années 50, en bonne voie de construire un système alimentaire auto-suffisant, dépendent désormais en majorité d’importations. Les pays à la sécurité alimentaire la plus faible sont en fait ceux qui ne peuvent compter que sur l’exportation d’une ou deux denrées (cash crops) pour financer leurs achats de nourriture. Or c’est précisément ce que de nombreux pays ont été contraints de faire dans les années 80 et 90 sous la pression du FMI et de la Banque Mondiale.

Le message principal de ce livre est qu’il faut repenser ce que signifie vraiment la sécurité alimentaire, en gardant en tête que c’est l’augmentation du bien-être qui devrait être le vrai objectif d’un système de production alimentaire (et non la seule production de calories).

L’auteur ne propose pas de solution concrète pour ajuster le système actuel, mais un indicateur plus complet de la sécurité alimentaire, appelé “Food and Human Security Index” (FHSI) qui se compose de 5 éléments :

  • Espérance de vie à la naissance
  • Niveau de satisfaction de la population
  • Utilisation d’eau par habitant (un indicateur de durabilité et du potentiel d’indépendance alimentaire)
  • Consommation par habitant de graisses et de sucres
  • Concentration dans la grande distribution

En utilisant cet indicateur composite, des surprises apparaissent : le Costa Rica, par exemple, a une sécurité alimentaire plus robuste que le Canada, les Etats-Unis, et même la Suède.

L’auteur dénonce  au passage le fait que la plupart des approches conventionnelles de la sécurité alimentaire considèrent que les pays plus pauvres n’ont rien à apprendre sur le sujet aux économies développées. Le recours au FHSI montre que c’est une erreur.

Ce livre est paru en 2013 et une recherche rapide sur Internet indique que le FHSI ne semble pas encore utilisé sur la scène internationale. Quoi qu’il en soit, ce livre offre des informations précieuses et un regard décalé qui en font une lecture passionnante, même si parfois un peu technique.